CAMEROUN : L’IMPOSSIBLE ALTERNANCE EN 2025 ?...

CAMEROUN : L’IMPOSSIBLE ALTERNANCE EN 2025 ?
C’est une analyse profonde que nous propose l’homme politique et écrivain Julins Sepo.

Dans mon ouvrage intitulé "MULTIPARTISME ET DÉMOCRATIE AU CAMEROUN : LES GRANDES OCCASIONS MANQUÉES POUR L’ALTERNANCE" paru en 2015, je décryptais la longue marche foireuse de l’opposition camerounaise vers un changement de pouvoir au Palais d’Etoudi et je proposais une piste pour en changer le locataire en 2018. Seulement, l’opposition camerounaise a encore surfé sur ses vieux démons et a essuyé une cuisante défaite en 2018 et je l’ai décrié dans l’ouvrage intitulé " ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES 2018 AU CAMEROUN : LE GÂCHIS". Comme je l’ai dit dans cet ouvrage, ne pas reconnaître que M. Kamto était la meilleure chance de l’opposition face à M. Biya en 2018 relèverait de la pure mauvaise foi. Autant en 1992 M. Fru Ndi de regrettée mémoire était la chance de l’opposition et n’a pas été accompagné par tous les candidats de cette mouvance, autant c’était le cas de M. Kamto en 2018. Or, celui-ci peut-il prétendre avoir le même aura en 2025 ? Si en 1997 Feu Fru Ndi revendiquait le droit d’être la tête de proue de l’opposition pour les élections présidentielles, ce n’était pas simplement au vu de son score de 1992, mais parce qu’aux municipales de 1996 et les législatives de 1997, son parti avait également capitalisé ce score de 1992 et prouvé qu’il avait le meilleur maillage de terrain et qu’il pouvait être une bonne locomotive pour les autres. Or, M. Kamto peut-il en dire autant ? A-t’il fructifié son capital acquis aux présidentielles de 2018 ? Que non ! On peut dire que M. Kamto s’est proprement fait Hara-Kiri en laissant ses autres concurrents de l’opposition prendre une certaine avance sur lui en refusant de faire compétir son parti aux scrutins locaux, notamment municipales et législatives.

Je suis souvent estomaqué lorsque j’entends certains de ses soutiens dire dans les médias que ce n’est pas à l’aune d’une élection qu’on mesure la force d’un parti politique, mais à sa capacité de brailler dans l’espace public. Pour ensuite dire que compte tenu de son résultat en 2018, M. Kamto reste le seul candidat crédible face à M. Biya. Quelle contradiction ! C’est à se demander s’ils ne veulent pas simplement proprement embrouiller les gens. Plusieurs camerounais peuvent vivre des centaines d’années si cela était possible sans ressentir l’impact du Président de la République dans leur vie. Par contre, ils peuvent toucher du doigt au quotidien les efforts d’un Maire pour l’amélioration de leurs conditions de vie. Les populations des communes où les candidats du MRC auraient pu occuper les exécutifs communaux sont en droit de demander à M. Kamto ce qu’elles lui ont fait pour mériter une autre mandature des exécutifs RDPC. Comme on peut le constater aujourd’hui, les choix stratégiques opérés par M. Kamto au lendemain de 2018 n’ont pas été de nature à construire une dynamique capable de le crédibiliser pour 2025. Les dernières élections présidentielles en RDC avec le résultat de M. FAYULU qui était arrivé en deuxième position à l’élection présidentielle précédente et qui ensuite a opéré les mêmes choix que M. Kamto sont assez éloquentes.

Depuis des années je propose aux forces de l’opposition des approches pour affronter les élections aussi bien sur le plan local que national. Seulement, ceux qui se disent "grands" et devraient rassurer les "petits" pour une répartition efficiente et efficace des espaces politiques se comportent comme des ogres alors qu’ils ne sont même pas capables de rentrer de la chasse avec un lapin. Toute victoire de construit avec des axes et des hommes tant au niveau national que local. Certains partis politiques croient qu’il suffit d’avoir quatre activistes des réseaux sociaux à Garoua, cinq à Maroua, trois à Nettoyage et j’en passe pour revendiquer une assise nationale. Même si le code électoral réduit considérablement la possibilité de candidats "fantaisistes", il n’en demeure pas moins qu’on a la possibilité d’avoir une quinzaine de candidats aux prochaines élections présidentielles. Normalement, partant du principe que M. Biya sera le pire des candidats comme toujours parce que ne présentant aucun bilan positif, il devrait être en principe celui qui recueillerait le moins de voix. Seulement, les profiteurs de son régime et leurs courtisans sont encore assez nombreux et aucun autre candidat en face ne peut décompter autant de voix. Il faut être réaliste pour pouvoir avancer, d’où la nécessité de se réunir afin que l’union des voix des autres puisse être supérieure à l’ensemble des voix que pourrait récolter monsieur Biya.

Cependant, la démarche que propose M. Kamto aujourd’hui et son nouvel affidé M. Nintcheu ressemble plus à une escroquerie politique qu’autre chose. M. Nintcheu parle des "partis politiques", des "associations" et personnalités qui constitueraient leur "APC", je le mets au défi de citer un seul parti ou une association. Quel est le but recherché derrière cette bouffonnerie si ce n’est de distraire les véritables forces de l’opposition qui travaille pour une candidature consensuelle ? J’ai toujours eu à rappeler qu’en 1992, sur les 36 partis politiques légalisés à l’époque, 12 soutenaient Feu Fru Ndi. Déjà, en 2018, le MRC nous a rabattu les oreilles avec une histoire de "MRC et Alliés" alors que sur plus de 300 partis, il ne pouvait pas citer 5 qui constituait cette alliance.
Loin de moi l’idée selon laquelle M. Kamto serait disqualifié pour une candidature à la candidature consensuelle quoiqu’il devrait expliquer un certain nombre de choses à ceux qui ne demandent qu’à comprendre son attitude, mais cette démarche doit être construite autour des autres candidats potentiels ou non, capables d’apporter une plus value à une candidature consensuelle. On travaille en coulisses d’abord et on n’annonce la coalition quand tout les autres sont d’accord et cela peut amener les autres à suivre la dynamique et non annoncer la coalition pour ensuite sommer les autres de suivre. J’ai l’habitude de dire que ceux qui nous gouvernent doivent cesser de croire que nous sommes plus cons que nous ne le sommes en effet, que ceux d’en face évitent de faire la même bêtise.
Rien n’est encore perdu. L’opposition peut encore travailler pour essayer d’offrir aux camerounais qui souffrent véritablement de ce régime une alternance tant souhaitée au sommet de l’Etat en 2025. Mais j’ai peut que l’histoire soit déjà mal embarquée à cause de quelques maladresses. Il est temps de se ressaisir. Sinon...
JH TINGUEU SEPO.